Prenez note, car la question est plus épineuse qu’elle n’y paraît. Le pervers narcissique sait-il ce qu’il est ? À première vue, on pourrait croire qu’il navigue en toute conscience dans les eaux troubles de la manipulation, ajustant son comportement avec une précision chirurgicale. Pourtant, la réalité est bien plus nuancée. Il ne suffit pas d’avoir des actes toxiques pour en avoir la pleine conscience. Certains s’assument, d’autres se cachent derrière des masques si bien collés à leur peau qu’ils finissent par s’y confondre.
L’un des plus grands paradoxes du pervers narcissique réside dans sa capacité à voir sans voir, à savoir sans savoir. Il manipule, détruit et séduit avec une mécanique si bien huilée que l’on pourrait croire à une stratégie parfaitement maîtrisée. Or, sa perception de lui-même est faussée. Il se perçoit souvent comme une victime, un être incompris ou un génie injustement persécuté. Ainsi, admettre qu’il est un bourreau reviendrait à fissurer l’armure qui protège son égo démesuré.
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Pour comprendre son degré de lucidité, il faut observer sa manière d’agir face aux autres. Il sait jouer avec les émotions, créer des illusions et effacer ses traces avec une agilité impressionnante. Ces facultés trahissent une certaine conscience de son comportement. Mais cette conscience est-elle analytique ou instinctive ? Fait-il cela de manière machiavélique ou par simple nécessité de survie ? La réponse oscille entre les deux. Il sait ce qu’il fait, mais il le rationalise à sa manière.
Certains pervers narcissiques, plus calculateurs, connaissent parfaitement la portée de leurs actes et les revendiquent même en cercle restreint. D’autres, en revanche, agissent comme s’ils suivaient un script qu’ils ne questionnent jamais. L’autojustification est leur bouclier : c’est toujours la faute des autres, des circonstances, du monde entier. Ils sont rarement dans une remise en question authentique, car cela impliquerait de reconnaître un vide intérieur qu’ils passent leur vie à fuir.
La vraie question n’est donc pas seulement de savoir s’il est conscient d’être un pervers narcissique, mais plutôt s’il est capable de l’admettre. Il est souvent plus aisé pour lui de se voir comme une victime intelligente que comme un bourreau rusé. Dans son univers mental, l’idée même qu’il pourrait être "mauvais" est insupportable. Il préfère alors s’inventer une réalité où ses actes sont justifiés, voire nécessaires.
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Alors, sait-il qu’il est un pervers narcissique ? Oui, mais non. Il en a une conscience diffuse, déformée par ses propres mécanismes de défense. Ce qu’il sait avec certitude, c’est comment obtenir ce qu’il veut, comment manipuler et comment éviter les conséquences. Mais la reconnaissance sincère de ce qu’il est ? Elle lui est presque impossible, car elle signerait l’effondrement de son propre mythe.
"Le manipulateur ajuste son masque en fonction de son interlocuteur. Il sait exactement quelles paroles toucheront, quels gestes envoûteront et quelles menaces immobiliseront. Pourtant, s’il pouvait se regarder sans filtre, que verrait-il ? Rien. Un vide abyssal, une coquille vide animée uniquement par le besoin de contrôler l’autre. Alors il ne se regarde jamais. Il se forge des histoires, des excuses et des mensonges, et finit par s’y croire lui-même. Car s’il devait affronter la vérité, il ne survivrait pas à sa propre illusion."
"Certains pervers narcissiques savent très bien qu’ils manipulent et en tirent une satisfaction malsaine. Pour eux, c’est un jeu d’échecs où chaque émotion arrachée à l’autre est un pion qu’ils déplacent sur leur plateau personnel. Mais d’autres sont des prisonniers inconscients de leur propre mécanisme. Ils répètent les mêmes schémas comme une horloge programmée à ne jamais s’arrêter, persuadés que c’est ainsi que le monde fonctionne. L’un est cynique, l’autre est aveuglé, mais les deux sont tout aussi destructeurs."
"L’idée qu’ils pourraient être ‘le problème’ leur est insupportable. Alors ils s’arrangent pour que tout soit toujours de la faute des autres. L’être aimé n’est pas blessé, il est trop fragile. L’ami qui s’éloigne n’est pas en souffrance, il est ingrat. Le collègue qui refuse de se plier n’est pas lucide, il est jaloux. Tout est inversé, retourné, recomposé pour que leur image d’eux-mêmes reste intacte. Ce n’est pas qu’ils ne savent pas ce qu’ils font, c’est qu’ils ne veulent pas savoir qui ils sont."
"Il existe une différence fondamentale entre savoir ce que l’on fait et savoir qui l’on est. Un pervers narcissique sait exactement comment blesser, comment séduire, comment diviser. Mais sait-il pourquoi il en a besoin ? Sait-il ce qui le pousse à détruire au lieu d’aimer ? Sait-il qu’il est un être vide qui ne se nourrit que des autres ? Tant que personne ne lui impose un miroir qu’il ne peut esquiver, il continuera à vivre dans son illusion : celle d’un être supérieur, incompris et libre. Alors qu’il n’est qu’un pantin de ses propres failles."
L’Encyclopédie de la Perversion Narcissique par Dr. Alain de Verneuil et Pr. Isabelle de Rochefort
Ces extraits illustrent la complexité de la conscience du pervers narcissique. Il n’est pas simplement un manipulateur qui agit en pleine connaissance de cause, ni un innocent qui ignore tout de son propre mal. Il oscille entre une lucidité partielle et une autojustification permanente. Certains cultivent la destruction en pleine conscience, d’autres s’enferment dans leur propre monde, incapable d’accepter qu’ils sont responsables de leur propre toxicité. Dans tous les cas, leur survie dépend de cette non-remise en question. C’est ce qui les rend si insaisissables.
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À retenir :
- Le pervers narcissique sait manipuler, mais sa conscience de sa propre toxicité est souvent biaisée.
- Certains en sont pleinement conscients et s’en amusent, d’autres sont aveuglés par leurs propres mécanismes.
- Il se perçoit rarement comme un bourreau, préférant s’imaginer comme une victime ou un génie incompris.
- Son refus d’admettre la réalité est une stratégie de survie psychologique.
- Il sait obtenir ce qu’il veut, mais il refuse de se confronter à ce qu’il est réellement.
Sources :
- PN à Nu par Pascal Pénault et l’Encyclopédie de la Perversion Narcissique par Dr. Alain de Verneuil et Pr. Isabelle de Rochefort, qui approfondissent les mécanismes de la perversion narcissique.
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